Amphithéâtre des sciences mortes. Erotique. Immortelle pour la nuit
des temps...
Ce livre de linitiation féminine, avant de
montrer que les formules de lexorcisme signifient beaucoup plus pour la femme que
pour lhomme, avant de montrer Ève, pour ainsi dire à létat de moyen dont le
Diable ou Nahah se sert pour envahir lhomme et le posséder, ce traité énonce le
théorème dans sa forme kabalistique. Je te déclare donc ton infériorité devant moi,
en tant que nous sommes lun et lautre représentant des deux catégories de
lespèce humaine.
Avant de te récrier, réfléchis, ma sur, et à lhonneur inouï que je te
fais en te supposant capable dintellection transcendante, et à lautorité
universelle du texte qui épigraphie ce discours.
Dois-je te rappeler encore que tu es le binaire, le passif, lhumide, le réflexe,
le relatif, que tu es le miroir où viennent sesthétiser les instincts, que tu es
le prisme de décomposition du désir universel et aussi le plan de réalisation
momentanée de la plénitude animique?
Si tu appelles patrie autre chose que ton foyer ou lépaule de lêtre
aimé, tu nes quune citoyenne : ferme ce livre et va pourrir.
Ton devoir nest jamais dattaquer une institution sociale, mais sans
cesse den corrompre les représentants au nom de lidéal ; tu dois être une
Orphée, lorsque la bêtise menace lintelligence, tu dois incanter le potentiel
féroce de la société et faire trébucher dans les lacs de la sexualité les officiers,
les magistrats, tous ceux à qui un pays délègue le pouvoir dopprimer
lexception ; tu dois, en agissant dans lordre des murs et par le seul
moyen de ton charme, être une perpétuelle conspiratrice en faveur du talent et du
génie.
Donc, ma sur, les gens en place, tout le fonctionnarisme sera la cible où
exercer ta sexualité ; mais prends bien garde de distinguer la fonction de lhomme
et de ne jamais accorder aucun respect si ce nest dans la forme et par habileté aux
étiquettes sociales. Sauf lAcadémie française, qui est le grand eunuquiat des
lettres et qui ne vaut rien, marque de la déférence aux autres classes de
lInstitut moins sujettes à la nullité et à lidiotie.
Le mâle vantard, vulgaire, vide, na pas de haine permanente, tandis que la femme
est toujours méchante à la femme, en un rut perpétuel de malveillance, que lon
constaste à létat monomanique, surtout chez la provinciale.
A. XXXII. Il ny a point de monument, de statue, ni de tableau admirable,
qui soit uvre féminine : elles nont rien fait que de médiocre ;
cest-à-dire de semblable à la moyenne des talents masculins de leur époque.
A. XXXIV. Son intérêt réside à se servir des lettres et des arts comme
dagréments supplémentaires, car sa force est tout entière en son sexe, dans son
vide qui sollicite lactivité sentimentale de lhomme et le fait agir.
A. XXXVI. La femme est incapable didée, de système, de philosophie, de
synthèse. La femme ne pense pas, et figurativement la femme na pas de cerveau.
A. XXXIX. Il nest pas sorti dune plume féminine une phrase abstraite
qui soit autre quune copie ou une bêtise.
A. XLIII. Il ny a pas une seule doctrine qui ait flori sans lenthousiasme
incohérent, mais nécessaire de la femme.
Aucune forme de lactivité nest interdite à la femme ; mais son mode
diffère de celui de lhomme, comme dans le phénomène de locomotion une espèce
animale procède différemment dune autre.
Cest un concordat entre labsolu et labsurde que je vais tenter :
accuse ta médiocrité seule si tu nes pas meilleure, ma lectrice, après ces pages
fraternellement enseignantes.
A moins de nécessité, le paressement au lit sera fructueux, car la femme na pas
à agir, et toute clarté lui vient de rêver : la stase horizontale lui convient,
cest la ligne de sa force, le sens de sa victoire, la posture de son bonheur.
Lamour est encore la seule forme de son bonheur, soit quelle
linspire, soit quelle le ressente ; il sagit donc pour elle de deux
gnoses : lart daimer et lart dêtre aimée.
Ces formules éveillent des idées françaises polissonnes et vides : quelle matière
plus grave, plus abstruse, plus tragique?
Prolonger la virginité des jeunes hommes davenir, tel est le devoir des fées ;
et lorsquelles ne pourront plus lutter contre linstinct, de veiller à ce que
la chute ne soit ni basse, ni vulgaire, il faut sauver léphèbe de la grossièreté
pour rénover lesthétique : similairement ce haut devoir a des continuations
pendant toute la période sentimentale.
Lhistoire est là terrible qui taccuse de naimer que
lêtre que tu tappropries. Jai cherché vainement quel génie tu as
discerné, quel talent tu as proclamé avant le public, sensible à la célébrité, non
pas au génie. Parmi les lectrices de Balzac prétendues enthousiastes, nulle na
jamais songé à payer ses dettes. Quand Wagner avait faim à Paris, et le soir de
Tannhauser, ô pecques mondaines, quavez-vous fait, associées aux crétinismes de
vos époux et de vos frères?
Et dabord, plastiquement, tu apprendras à reproduire devant ta glace les
rythmes nus des chefs-duvre grecs ; ensuite tu essayeras les effets de
draperie dite mouillée, puis flottante ; enfin tu passeras à létude des
vêtements. Le plus noble est toujours celui où le pli vertical domine : décorativement,
la robe doit être développée en longueur et collante en largeur.
Au point de vue du parlage, il faut soigner lintonation, la femme ne disant
jamais rien qui vaille
la femme ne modifie que lextériorité et non par elle, mais par
lapplication de lor à lamour ; si la comtesse Hanska eût été pauvre,
Balzac neût pas insisté si longtemps.
Il n'y a pas un seul homme de génie que sa femme n'ait diminué : l'engendreur selon
l'esprit est impuissant aux résistances nerveuses de l'intimité, et la nature du binaire
oxide littéralement les caractères.
"Vaut-il mieux me dira-t-on si on est pauvre, se prostituer,
que chercher à gagner sa vie par la plume." Assurément, si on précise ce terrible
mot.
La femme amorce l'homme en un début de séduction, mais le garde par sa puissance
d'embêtement. Je n'ai pas d'autre expression pour figurer cette faculté permanente
d'être insupportable sans cesser et qui explique tant de vies conjugales. Il semble que
l'homme pourrait défenestrer cet être qui ne vaut que s'il vous aime ; il semble mal :
la femme, entrée une fois dans ce rôle de bourrèle intime, devient la norme de la
douleur, dès lors sa force est abstraite ; agissant pour le compte des lois
providentielles, elle lève l'impôt du dam. Aussi nul ne connaît un époux qui ait
triomphé dans l'intimité, sinon comme brutal et assommeur.
voilà pourquoi je te livre l'homme ordinaire, tu le peux posséder sans méfaire.
Quant à l'être d'exception, il y a un seul cas où tu peux te l'approprier : quand tu
le sauves ; et tu ne peux sauver ni par ta beauté, ni par ton âme, mais par l'emploi de
l'or. Si tu es pauvre, tu peux certes devenir fée, mais il te faut devenir riche
Il n'y a pas de fée sans baguette : il n'y a pas d'amour sans luxe. On se figure
aisément Spinosa polissant ses verres : il est encore Spinosa ; mais la femme, n'existant
pas comme personne, ne s'individualise que par un charme ou une vertu
Dans Comment on devient mage, on lit que la femme peut créer en musique, je demande
pardon de cette bêtise, que javoue et que je prie doublier.
Les riches sont bêtes ; et il faut que tu sois riche, sinon sainte ; en ce cas mon
livre nest pas digne de tes yeux.
Les intelligents sont pauvres ;
A. LXXXV. Ton rôle animique est dêtre bourrèle de tous les incapables de
souffrance morale volontaire et qui sans toi ne souffriraient que dans leur corps.
Car tu es la poésie des gens daffaires et le point aboutissant de la fortune et
du luxe.
A. LXXXVI. Fais deux parts de la vie, et conçois deux modes daction de ta
grâce, lune dévouée et lautre exigeante et combattive ; car il est aussi
vrai que tu dois obéir à lintellectuel quil est vrai que tu commandes à
lanimique.
Par le premier, tu acquiers lélément idéal qui te manque, par le second,
lélément décoratif quil te faut ; le grand uvre de la femme
sopère sous la double influence de la spiritualité et de lor. Vainement tu
voudrais parvenir à la féerie sans ces deux choses, ou seulement avec lune.
LÉglise enseigne à devenir sainte, à devenir mère ; je ne pédagogise que la
féerie, je madresse aux êtres incapables de grandes vertus, et je les oriente vers
la beauté.
Au cas où ton attraction et ton destin se rencontrent tout à fait contraires, voici
laccommodation : tu peux être la fée de lun et lépouse de
lautre.
Ton devoir dépouse te défend ladultère, non pas la charité et la
préférence dans la charité ; touche de ta baguette dor le destin dun cher
autrui : on nest pas fée pour se donner seulement, toutes les amantes seraient
fées ; tandis que la féerie consiste à agir comme une sour et non comme femme ; de là
deux féerries.
Souviens-toi dans les baisers mêmes que tu nes que la bourrèle du bien-aimé,
lui-même ton bourreau, et que cest la norme de pleurer ou damour ou de foi ou
denthousiasme, et que la passion cest la douleur esthétique, rien de plus.
Quel est donc le devoir damour?
A. XCVI. Prestigier devant le cerveau des intellectuels et empriser lâme des
autres.
A ta besogne de tortionnaire, femme, applique-toi ; il faut de la douleur pour le
péage humain, de la douleur consentie ; tenaille-les de tes caresses mêmes ; au supplice
les sans-Dieu, cest-à-dire à lAmour, je les voue au néant, je les voue à
la fée.
Aucun discernement ne lavertit de la valeur dun être ; son sexe seul
vibratil ne prévoit pas un avenir, tandis quil sémeut toujours devant la
célébrité.
O butorde, que ne puis-je touvrir les yeux ; la ménagerie des fonctionnaires,
lécurie des mondains et ceux de la caserne et ceux du port et ceux du palais et
tous ceux qui nexistent pas, du président au général, ce tas dhommes
devraient vivre prosternés sur tes mules, ce tas dêtre animiques, vides comme toi,
mais plus laids, sont ceux qui jouissent de ta beauté, de ton sourire, de tes prestiges :
tu es tout pour eux puisquils ne pensent pas. Soumets-les donc, ton caprice vaut
leur volonté perverse.
Holà! Kundry, debout! Holà! vois là-bas cet homme-chèque, un Rotschild, un Hirsch,
un Van der Bilt ; sus! sus aux millions impurs, sus aux imbéciles, sus à Bonhomet, à
Prudhomme, à Homais!
Saccage ces existences, disperse ces fortunes, anémie ces cervelles ; sois le
châtiment, la femme montée sur la bête de lApocalypse.
Va au néant, jouet de Nahash, et sois dévoré par les forces que tu auras
provoquées, va, binaire, va molécule d'aimantation passive, impersonnelle et vaine. Dame
Tout-le-Monde, tu ne fus jamais un être, tu n'es que la particule d'une espce ; que le
vulgaire courant des choses t'entraîne au schéol, éternel féminin, dynamisme
incohérent, Femme-Chose!
A. CXLVI. L'amour devrait être la forme la plus vive de la charité, parce qu'il
correspond à la plus grande détresse de l'âme.
si les femmes sont capables de gouverner, que Dieu les élise au salut des États
réduits à lextrémité
Éléemon, sois compatissante et à lui et à toi ; ton bel amour, cet Adonis,
nest quune victime pour le sanglier symbolique. Souviens-toi dans les baisers
mêmes que tu nes que la bourrèle du bien-aimé, lui-même ton bourreau, et que
cest la norme de pleurer ou damour ou de foi ou denthousiasme, et que la
passion cest la douleur esthétique, rien de plus.
Quel est donc le devoir damour?
A. XCVI. Prestigier devant le cerveau des intellectuels et empriser lâme des
autres.
Ne condamnez jamais leffort dautrui sil est sincère et doux.
Sois donc sororale à l'homme, soit qu'il rayonne sur ton âme et la féconde, soit
qu'il agisse sur ta vie et te donne le luxe : je ne puis te livrer que les mauvais riches
et les fonctionnaires sociaux : ceux-là, fais-en carnage, sois leur fléau.